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Mondes de l'éducation

La construction de l'identité professionnelle des enseignant(e)s - résultats de sept pays

Publié 31 mai 2017 Mis à jour 11 juillet 2017
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Les premières étapes dans les projets de recherche sont toujours un mélange d'aspirations, d'exploration dans la littérature de recherche et d’une clarté grandissante sur les questions clés. Dans un projet de recherche aussi important que celui financé par l'Internationale de l'Education pour déterminer comment les politiques nationales et les facteurs culturels influencent le développement de l'identité professionnelle des enseignant(e)s, cette étape est particulièrement intéressante, et aussi un peu décourageante parce que toutes les identités professionnelles ont des implications existentielles.

L'identité de l'enseignant(e) est particulièrement difficile pour la recherche car, comme le formule Day (1999): « L'identité professionnelle des enseignant(e)s est en constante évolution dans un processus continu d'interprétation et de réinterprétation d'expériences. » Selon vous, quel genre de questions devrions-nous nous poser dans le cadre de cet important ensemble d’objectifs? Comment pouvons-nous nous assurer de ne pas nous perdre dans l'abstraction?

Les pieds sur terre, nous nous concentrons tout d’abord sur les expériences qui favorisent le plus les enseignant(e)s et celles qui se mettent en travers de leur chemin. La tête dans les nuages, nous étudions également la manière dont les syndicats, les gouvernements et les enseignant(e)s eux-mêmes/elles-mêmes peuvent profiter des observations qui découlent de comparaisons internationales. La plupart des pays considèrent l'éducation comme un élément central à l'expression de l'identité nationale et à l'édification de la société de l'avenir. Enfin, bien que lentement, les gouvernements nationaux commencent à réaliser que dans cette importante entreprise, le rôle, l'identité et la contribution des enseignant(e)s s’étendent bien au-delà des cadres législatifs et structurels qu'ils ont mis en place. Mais vu la nature existentielle de l'éducation pour l'identité nationale, ils veulent ici aussi exercer leur influence.

Quels éléments de base les gouvernements semblent-ils utiliser pour exercer cette influence? Les réformes de l'éducation actuelles semblent être axées sur la définition de normes professionnelles nationales et sur les dispositions en matière d’accréditation, en précisant (et dans le meilleur des cas, en finançant) l'apprentissage et le développement professionnel et en accordant la priorité à l'examen professionnel et à l'évaluation des enseignant(e)s. La gamme d'approches est très étendue. La plupart des pays précisent certain points de manière hermétique et en laissent d’autres à « la discrétion locale » (potentiellement applicable au niveau de la classe, de l'école ou du district). Mais quelle que soit la combinaison de spécifications, l’interprétation locale et l'autonomie de l'enseignant(e), les enseignant(e)s voguent seul(e)s de Charybde en Scylla face au règlement, aux mesures de responsabilisation et à l'espace pour le jugement professionnel. Les enseignant(e)s doivent penser et se comporter de manière professionnelle:

  • en adoptant des caractéristiques professionnelles, des connaissances et des attitudes prescrites à l'échelle nationale, régionale et au niveau scolaire; et
  • en élaborant un parcours professionnel personnel au travers de ces attentes et exigences.

Notre proposition de travail actuelle veut que les identités professionnelles des enseignant(e)s émergent de façon itérative à partir des interactions entre leur disposition personnelle, leurs compétences et leurs expériences d’une part et leur environnement de travail d’autre part. Mais cela ne nous rapproche pas beaucoup de l’ensemble de filtres raisonnablement cohérents qui nous permettront de donner un sens aux approches radicalement différentes d’une nation à l’autre, des nations dont les systèmes éducatifs sont à différents stades de développement sur le chemin des objectifs d'éducation, d'équité et de justice sociale.

Dans un sens plus pratique, que devrions-nous envisager afin de construire un tout significatif plus grand que la somme des parties, sur la base de la recherche sur les dispositions des enseignant(e)s envers leurs étudiant(e)s et les un(e)s envers les autres, mais aussi sur la base de leurs expériences, leurs perceptions et leurs milieux de travail partout dans le monde?

Nous avons identifié certains modules à partir de la littérature issue de la recherche mais nous aimerions que vous nous disiez s’ils sont susceptibles de rassembler des éléments essentiels de l'expérience et de l’identité des enseignant(e)s dans votre contexte.

Les directeurs(trices) d’école ont la capacité de restreindre ou d’accroître le leadership des enseignant(e)s; certain(e)s le font intentionnellement, d’autres accidentellement. Par exemple, les dirigeant(e)s de l'école transformatrice se positionnent dans des rôles héroïques comme des « super chefs » responsables de la hausse de rendement et positionnent de ce fait les enseignant(e)s comme disciples. En revanche, l’intention des dirigeant(e)s des établissements scolaires sur la répartition des postes à responsabilités positionne chaque enseignant(e) en tant que leader dans un réseau complémentaire et solidaire de responsabilités réciproques pour la réussite des étudiant(e)s. Cette distinction binaire est-elle significative comme énoncé de différentes extrémités d'un spectre? Ou devons-nous développer les filtres pour explorer d'autres cadres nationaux et locaux pour activer et/ou restreindre les choix des dirigeant(e)s dans l'élaboration d’un cadre propre au rôle de leadership des enseignant(e)s?

Développer une agence professionnelle des enseignant(e)s, une voix, un apprentissage et un développement semble correspondre à des marqueurs évidents de la manière dont différentes nations restreignent, accentuent et/ou limitent l'identité professionnelle des enseignant(e)s. Cela est en lien avec différents modèles d'autonomie, d'accès aux connaissances professionnelles et modèles de collaboration. L'apprentissage professionnel est particulièrement important pour façonner l'identité de l'enseignant(e); l’analyse de diverses recherches converge pour souligner l'importance de la collaboration et du partage des risques au sein du développement professionnel et de l’apprentissage (DPA). Certaines recherches vont plus loin et soulignent l'importance de se concentrer sur l'efficacité individuelle et collective, ainsi que sur le statut et le bien-être tels que perçus par l’enseignant(e). Les preuves dans ce domaine soulignent largement la proactivité de l'enseignant(e) dans le développement des connaissances et compétences professionnelles. Nous nous demandons dès lors si le fait d’étudier à la fois les exigences et les cadres juridiques et les expériences propres des enseignant(e)s en termes de création de connaissances, de planification, d'apprentissage professionnel et de développement/d’officialisation du programme va nous aider à révéler des principaux catalyseurs et inhibiteurs de l’identité professionnelle.

Quels autres éléments pourrions-nous devoir envisager pour comprendre l'essence de ce processus important dans votre contexte? Par exemple, nous savons que dans certains cas, l'organisme professionnel a dû évoluer dans le domaine de la « résistance de principe » aux décisions de la politique nationale, une résistance facilitée par des formes collectives d'action. Mais dans d'autres cas, comme celui des réformes actuelles en Suède, il semble que l'élaboration de politiques et l'identité professionnelle collective des enseignant(e)s évoluent de façon itérative dans le cadre d’une observation conjointe et de la planification des réformes.

L'enseignement évolue, comme tout autre élément de la société. Le monde dans lequel nos étudiant(e)s vivent évolue encore plus vite. En plus de construire sur des preuves du passé au travers d’analyses de recherches, ce projet se tournera également vers l'avenir. Nous nous concentrons dès lors sur la valeur des réseaux et sur la façon dont les technologies de collaboration, y compris les tweets et blogs professionnels, offrent de nouvelles possibilités pour les réseaux d’enseignant(e)s aux niveaux local, national et transnational. Pourraient-ils ouvrir de nouvelles perspectives pour le développement d'une identité confiante et auto-réglementée de la profession enseignante? Ou voyez-vous d'autres nouvelles tendances très exigeantes envers les enseignant(e)s ou ouvrant des perspectives nouvelles, collectivement plus efficaces pour la profession que réseaux sociaux?

Nous allons travailler directement dans sept pays participant à l’étude de cas: le Chili, l'Allemagne, le Kenya, l'Ontario, l'Ecosse, Singapour et la Suède. Mais nous avons envie d'entendre ce que les enseignant(e)s et les responsables de recherches sur les enseignant(e)s dans le monde entier ont à nous dire sur les éléments importants qui pourraient nous manquer afin d’élargir la contextualisation de notre étude.

N’hésitez pas à nous contacter pour nous faire part de votre opinion!

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.