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Mondes de l'éducation

Photo: Laura Mougel / Flickr
Photo: Laura Mougel / Flickr

« Les capacités productives développent la contribution de l’EFTP à la justice sociale », par Gavin Moodie.

Publié 23 juillet 2019 Mis à jour 23 juillet 2019
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Le nouveau rapport de l’Internationale de l’Education sur « L’enseignement et la formation techniques et professionnels en tant que cadre pour la justice sociale » trace une nouvelle voie pour l’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) afin de promouvoir la justice sociale.

Il s’agit du deuxième projet commandé par l’Internationale de l’Education sur le rôle de l’EFTP dans le soutien de la justice sociale. Le premier, Tendances mondiales dans le secteur de l’EFP: définir un cadre pour la justice sociale, publié en 2016, proposait la notion de « capacités productives ». Ce projet prolonge ce travail à travers sept études de cas nationales qui ont exploré différents types de systèmes d’EFTP et la nature des sociétés et des économies dans lesquelles ils étaient intégrés: Argentine, Australie, Côte d’Ivoire, Angleterre, Ethiopie, Allemagne, et Taiwan.

Le nouveau rapport(en anglais) avance que l’EFTP fait progresser les capacités productives, qui sont ce queles gens sont capables d’être et de faire au travail et, par le travail, de se réaliser et de réaliser leurs objectifs. Les capacités productives étendent l’approche des capacités humaines développée par le lauréat du prix Nobel d’Economie Amartya Sen et la philosophe Martha Nussbaum pour étayer la conception et le financement du système d’EFTP, le rôle des enseignant·e·s et des institutions d’EFTP et le programme d’enseignement d’EFTP.

Les capacités productives désignent les ressources et les modalités de travail ainsi que les connaissances, les compétences et les qualités générales dont les personnes ont besoin pour être productives au travail, pour progresser dans leur carrière et pour participer à la prise de décisions concernant leur travail. Les étudiant·e·s en EFTP doivent comprendre comment leur champ de pratique s’inscrit dans leur communauté et leur société, et ils·elles ont besoin d’avoir la capacité d’être des « citoyen·ne·s » dans leur domaine, afin de pouvoir contribuer à façonner leur avenir.

Les capacités productives se situent et se concentrent à un niveau intermédiaire spécialisé, la filière professionnelle. Un volet professionnel relie les professions qui partagent des pratiques, des connaissances, des compétences et des attributs personnels communs. Les filières professionnelles augmentent la flexibilité horizontale et la transférabilité au travail en reliant les professions dans un vaste champ de pratique. Elles augmentent également la flexibilité et la progression verticales en soutenant la formation et la progression professionnelle dans un vaste champ de pratique.

Le rapport de l’Internationale de l’Education présente les capacités productives comme une alternative à la théorie du capital humain qui continue de façonner l’EFTP malgré sa fragilité empirique et sa faillite normative.

Les recherches effectuées aux fins du rapport ont révélé que les capacités productives reposent sur des ressources sociales, économiques, culturelles et physiques plus vastes. L’EFTP dépend également d’une « infrastructure douce » : des institutions qui permettent aux sociétés de fonctionner, telles que le système éducatif général, les services sociaux et de santé, le système juridique et le système financier.

Le rapport soutient que toutes les qualifications postsecondaires devraient avoir ces trois rôles, bien que l’accent mis sur chaque rôle puisse varier selon les qualifications:

  1. Marché du travail. Les qualifications devraient permettre à la main-d’oeuvre d'y accéder et d'y progresser.
  2. L'éducation. Les qualifications devraient fournir aux étudiant·e·s les connaissances et les compétences dont ils·elles ont besoin pour étudier à un niveau supérieur dans leur domaine ou dans un domaine étroitement lié.
  3. La société. Les qualifications devraient contribuer à la société en développant l'appréciation et la contribution des étudiant·e·s à la culture et à la société. Elles devraient développer la capacité des individus à contribuer à leur famille, à leur communauté et à leur profession. Les qualifications contribuent également à l'inclusion sociale en soutenant l'inclusion dans l'éducation et sur le marché du travail et en contribuant à une société plus tolérante et inclusive.

Afin de développer les capacités productives, l’EFTP développe les individus dans trois domaines:

  1. La base de connaissances de la pratique. Cela inclut les connaissances théoriques nécessaires pour le domaine de pratique, mais aussi pour les études supérieures au sein de la profession. Cela comprend également la connaissance de l'histoire et de la trajectoire de leur champ de pratique, des dilemmes et des débats éthiques, ainsi que la connaissance des pratiques durables.
  2. La base technique de la pratique. Cela inclut les connaissances et les compétences de l'industrie, ou la capacité d'exécuter des rôles et des tâches particuliers, qui transcendent les milieux de travail individuels.
  3. Les attributs dont la personne a besoin pour cette profession. Cela inclut des attributs tels que la pratique éthique, mais aussi des compétences de communication efficaces, la capacité à travailler de manière autonome et en équipe, la créativité, la gestion de l'information, etc. Bien qu'ils soient parfois décrits comme généraux ou génériques, ils sont compris différemment dans les différents domaines de pratique et doivent être développés dans des disciplines et des professions spécifiques. Puisque les capacités sont ancrées dans leur contexte, les capacités productives exigent une compréhension de la nature du travail, de la relation entre l'éducation et le travail, et du type de personne qualifiée que nous voulons produire.

Le rapport affirme que les établissements d'EFTP ont un rôle important à jouer pour ancrer leurs communautés en développant les éléments suivants:

  • Travailler de manière proactive avec les partenaires sociaux dans la région et au niveau national (le cas échéant) pour soutenir un développement social et économique durable et inclusif;
  • Anticiper, élaborer, codifier et institutionnaliser la base de connaissances de la pratique pour l'avenir ainsi que pour le présent tout en considérant la manière dont le travail évolue et les implications que cela a pour les futurs programmes. Il s'agit d'un rôle crucial qui soutiendrait l'innovation et qui exige des enseignant∙e∙s dûment qualifié∙e∙s et soutenu∙e∙s qui s'engagent dans la maîtrise de l'enseignement et de l'apprentissage et dans la recherche sur la façon dont leur domaine évolue;
  • Offrir aux étudiant·e·s une gamme suffisamment complète de programmes qui leur permettent de réaliser leurs aspirations et leur fournir une vaste gamme de services et de soutiens nécessaires pour atteindre leurs objectifs; et
  • Développer des qualifications qui répondent aux besoins des étudiant·e·s, des communautés, des industries locales et des régions.

L'EFTP joue également un rôle important dans le développement des professions et des industries.

  1. Il représente un réservoir d'expertise et de ressources accumulées;
  2. Il ouvre une expertise dans l'organisation des connaissances, la restructuration des connaissances pour de nouveaux objectifs et leur présentation à de nouveaux publics (enseignement) ;
  3. Il transfère de nouvelles idées provenant de l'extérieur de la profession et de l'industrie locale; et
  4. Il joue un rôle potentiellement précieux dans la codification, la restructuration et la systématisation des règles et des procédures de pratique, non seulement pour élaborer les programmes d'études, mais aussi pour établir des normes d'évaluation qui peuvent être d'importantes normes industrielles.

Le rapport fait valoir que pour remplir ces rôles, l'EFTP a besoin d'institutions fortes dotées d'enseignant·e·s, d'agents de soutien à l'éducation et de personnel administratif expert∙e∙s et bien soutenu∙e∙s. L'EFTP doit également s'institutionnaliser dans le sens sociologique afin d'être généralement compris par le public avec des normes et des formes organisationnelles établies qui sont renforcées par les attentes et le comportement des autres institutions, organisations et acteurs.

Le rapport complet de l'Internationale de l'Education par Gavin Moodie, Leesa Wheelahan et Eric Lavigne peut être téléchargé ici(en anglais).

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.